Voici tout juste un mois, le projet de loi SB3 qui devait interdire le THC dans l’État du Texas, même en infime quantité a été envoyé au bureau du gouverneur pour obtenir sa validation, après avoir été approuvé par le Sénat et la chambre des représentants. Une dernière étape essentielle qui, contre toute attente, ne s’est pas déroulée comme prévue, au grand soulagement des professionnels de la filière.
Nous avions décrit ici-même le 25 mai dernier les modalités du projet de loi SB3 largement adopté par les législateurs du Texas et qui avait pour objectif essentiel d’interdire le THC dans tout l’État, même dans les villes où le cannabis est actuellement dépénalisé. La dernière étape avant que la nouvelle loi puisse être appliquée consistait à obtenir la signature du gouverneur de l’État, Greg Abbott, un Républicain plutôt vu comme un homme intransigeant et conservateur et qui n’a jamais témoigné d’une appétence particulière pour la marijuana, bien au contraire. Les associations de défense du cannabis et les professionnels de la filière prévoyant une décision favorable du gouverneur se montraient donc particulièrement pessimistes et avaient multiplié les initiatives tout au long du mois de juin, afin que la loi SB3 ne passe pas l’épreuve décisive de la signature suprême. Au programme, protestations officielles, pétitions, manifestations de soutiens aux entreprises et aux différents acteurs du marché cannabique, mais aussi des initiatives plus surprenantes…
Ainsi au début de ce mois, quelque 120 000 Texans, agriculteurs, petits propriétaires, chefs d’entreprise, personnalités politiques ou encore de nombreux anciens combattants, dont beaucoup soignent leur stress post-traumatique avec du cannabis ont rédigé et expédié un courrier de protestation au gouverneur, afin que sa signature ne valide pas le projet de loi SB3. Est-ce cet afflux massif de courrier dans le bureau de Greg Abbott qui a influencé sa décision, des calculs économiques plus prosaïques ou de manière probable un mélange de tout cela, toujours est-il que le gouverneur du Texas a refusé de ratifier la nouvelle loi et y a opposé son veto. Il a par ailleurs appelé à ce qu’une séance législative se tienne à partir du 21 juillet prochain, afin de « réexaminer la question ». Une décision inattendue qui a fait bondir de joie les opposants au projet et redonné espoir aux professionnels du cannabis, mais aussi suscité l’incompréhension des initiateurs et des défenseurs de la loi, majoritaires à la chambre des Représentants et au Sénat.
Le gouverneur du Texas, Greg Abbott, a finalement opposé son veto au projet de loi SB3 qui aurait interdit le THC dans tout l’État.
Si la loi SB3 avait été ratifiée par Greg Abbott, elle « aurait interdit la plupart des cannabinoïdes enivrants dérivés du chanvre sous forme comestible, de vape et de fleur, tout en maintenant le CBD légal selon des règles plus strictes ». Dans le détail, le projet aurait ainsi prohibé toute vente et publicité aux moins de 21 ans de produits contenant des cannabinoïdes (donc du CBD ou du CBG, seuls autorisés), mais aussi dans un rayon de 300 mètres autour d’une école ou d’un établissement accueillant des mineurs. Lesdits produits auraient dû en outre être contenus dans un emballage refermable et « inviolable » par les enfants. Quant aux sanction prévues pour les contrevenants, elles allaient d’un délit de classe A (soit six mois à un an de prison et jusqu’à 100 000 dollars d’amende) pour la possession de produits à base de chanvre contenant des cannabinoïdes autres que le CBD ou CBG, jusqu’au crime au troisième degré (10 à 25 ans de prison et 250 000 $ d’amende) pour la fabrication et la vente de ces mêmes produits. Un délit de classe A qualifiait également l’expédition par la poste de produits issus du chanvre contenant n’importe quel cannabinoïde.
En opposant son veto, Greg Abbott n’a pas pour autant légalisé le cannabis récréatif dans l’État, mais il a stoppé la progression du projet de loi qui ne sera donc pas adopté, en tout cas pour le moment. Bien sûr les initiateurs du projet ont la possibilité de le présenter à nouveau, à l’issue par exemple de la séance législative demandée par le gouverneur. Il faudra alors qu’il soit une nouvelle fois validé par les deux chambres législatives des représentants et des sénateurs, avant un retour sur le bureau de Greg Abbott. On voit mal néanmoins pourquoi ce dernier déciderait de signer la loi sans aucune modification de celle-ci, d’autant plus que son refus est probablement le résultat de consultations avec les différents responsables de l’économie locale. Le marché du cannabis au Texas représente en effet des dizaines de milliers d’emplois et son chiffre d’affaires est en augmentation croissante avec 8 à 9 milliards de dollars prévus pour cette année et des recettes fiscales représentant des dizaines de millions de bénéfices pour l’État. Et même si les initiateurs du projet ont argué que l’interdiction concernait essentiellement des produits consommables, ces derniers représentent en réalité la majorité de l’activité des producteurs dont beaucoup seraient obligés de mettre la clef sous la porte si le SB3 faisait sont retour assorti cette fois-ci d’une validation gouvernementale.