Les États américains d’Indiana et de Caroline du Nord font partie de ceux qui n’ont encore autorisé aucune forme de cannabis. Alors que dans le premier nommé, la marche vers la légalisation vient à nouveau d’être entravée par une partie des responsables, l’espoir renaît dans le second où un projet de loi en faveur du cannabis médical a été déposé en début de semaine par un groupe de sénateurs. Le point sur la situation dans ces deux États où le cannabis constitue un sujet épineux depuis maintenant plusieurs années.
Si le cannabis s’est largement démocratisé aux États-Unis, il reste néanmoins 11 États sur les cinquante que compte le pays, qui n’ont légalisé à ce jour aucune forme de cannabis, qu’il soit médical ou récréatif. Parmi ceux-ci, on compte l’Indiana et la Caroline du Nord, où le sujet du cannabis revient régulièrement sur le devant de la scène. En Indiana, un État du nord bordé notamment par le lac Michigan, les sénateurs républicains, majoritaires à la chambre ont rejeté en début de semaine une nouvelle proposition de loi en faveur de la légalisation du cannabis, portée par les démocrates en la personne du sénateur Rodney Pol. Ce dernier proposait en effet de « créer un marché réglementé du cannabis à usage adulte », visant autant le chanvre thérapeutique que la marijuana. La séance se tenant dans le cadre de la nouvelle loi de finances de l’État, le sénateur démocrate a notamment argué du fait que l’Indiana perdait chaque jour de l’argent en retardant la légalisation du cannabis, déjà actée dans les États voisins comme le Michigan ou l’Illinois.
Il a poursuivi en évoquant de substantielles recettes fiscales détournées vers ces États dans lesquels les habitants de l’Indiana vont s’approvisionner, faute de pouvoir le faire dans leur État de résidence. Rodney Pol a également défendu le chanvre thérapeutique, susceptible d’apporter un soulagement aux personnes atteintes de douleurs chroniques ou de maladies comme les cancers, l’épilepsie ou la sclérose en plaques et pour lesquels le cannabis se révèle plus efficace que les médicaments. Le sénateur a achevé sa plaidoirie en décrivant les avantages d’un marché cannabique réglementé dans les domaines de la sécurité et de la délinquance, susceptible d’améliorer le premier et de réduire sensiblement le second. Mais las, l’opposition est restée sourde aux arguments de Rodney Pol dont l’amendement déposé en janvier dernier a finalement été rejeté après un vote à main levée. Les défenseurs de la légalisation avaient pourtant repris quelque espoir après l’investiture du nouveau gouverneur Mike Braun le 13 janvier.
La légalisation du cannabis thérapeutique demeure encore incertaine en Indiana et en Caroline du Nord.
Républicain tout comme son prédécesseur Éric Holcomb, mais plus ouvert sur le sujet du cannabis, il avait ainsi déclaré qu’il était « probablement temps d’autoriser l’accès au chanvre thérapeutique ». Il semble donc que l’avis du gouverneur ne soit pas partagé par les sénateurs de son parti, le Président de la Chambre des Représentants, Todd Huston, également républicain, ayant même exprimé son scepticisme sur l’efficacité du cannabis médical, le jugeant délétère pour la santé mentale. Les sénateurs avaient déjà rejeté en janvier une proposition de loi démocrate en faveur de la légalisation du cannabis récréatif, en proposant de le retirer de la liste des produits contrôlés. En Caroline du Nord, la situation est un peu similaire, même si rien n’a encore été acté. En effet, les sénateurs démocrates ont déposé ce lundi un projet de loi en faveur du chanvre médical, grâce auquel il serait possible de détenir jusqu’à 42 grammes de cannabis (1,5 once), mais uniquement pour des patients qui participeraient à une étude sur le cannabis.
Dans le cadre de cette proposition des sénateurs démocrates parrainée par la représentante de la Chambre Julia Greenfield et baptisée « Loi de recherche sur le traitement du cannabis » (projet N°984), lesdits patients devraient être dûment enregistrés auprès du ministère de la Santé, tout comme les institutions souhaitant mener des études scientifiques sur le cannabis, incluant aussi bien des universités, des hôpitaux ou des laboratoires que des entreprises privées se consacrant à la recherche médicale. Ceci, afin que tous les candidats intègrent une base de données où leur inscription les protègerait toutes sanctions pénales, amendes ou arrestations. Quant au contenu des études, il pourrait concerner aussi bien les aspects techniques du cannabis (étiquetage, contrôle de la qualité, traçage des produits…) que ses vertus curatives ou ses dangers potentiels sur l’organisme (étude des souches et des variétés, recherche sur les traitements les mieux adaptés aux différentes maladies concernées par le produit, etc.).
L’adoption de la loi par les sénateurs irait dans le sens de l’opinion générale, puisque 71 % des électeurs de Caroline du Nord (et même 78 % selon certains sondages) se disent favorable à la légalisation du cannabis thérapeutique, contre seulement 18 % qui y sont opposés. En juin 2022 et janvier 2023, deux propositions de loi avaient déjà été déposées, toutes les deux adoptées d’abord au Sénat par 36 voix contre 10, puis finalement rejetées par la Chambre des Représentants dirigée à l’époque par Tim Moore, un farouche opposant au cannabis sous toutes ses formes. Le nouveau président, Destin Hall, un républicain pur jus, voit hélas lui aussi la légalisation du chanvre médical d’un très mauvais œil. Un autre projet de loi, cette fois-ci destiné à autoriser le cannabis récréatif est également sur le gril, mais les chances qu’il soit adopté sont infimes, aucun État américain n’ayant jusqu’à aujourd’hui légalisé la marijuana avant le chanvre thérapeutique. En attendant le verdict, la possession et la vente de cannabis demeure un délit en Caroline du Nord, sanctionné par une amende de 200 $ jusqu’à 14 g et jusqu’à 120 jours de prison pour une possession comprise entre 15 et 45 g.