Après la nomination provisoire de Derek Maltz par Donald Trump à la tête de la DEA en janvier dernier, un choix qui avait déjà largement inquiété les défenseurs d’une légalisation fédérale du cannabis aux USA, le nouveau président vient de nommer officiellement Terrance Cole au poste d’administrateur de l’agence. Cette décision résonne comme un véritable coup de tonnerre, Cole étant connu comme son éphémère prédécesseur pour son opposition de longue date au cannabis.
La Drug Enforcement Administration (DEA) est une agence fédérale américaine qui dépend du département de la Justice. Elle est chargée de lutter contre le trafic de drogues dans tout le pays et dispose donc de pouvoirs de police assez étendus, employant pour ses missions quelque 18 800 personnes dont 5 300 agents spéciaux, répartis au sein de 237 bureaux sur le sol américain. Ses prérogatives ne se limitent pas aux seuls États-Unis, puisque la DEA est présente dans 58 pays à travers ses 80 agences étrangères. Autant dire qu’il s’agit d’une véritable force de frappe internationale comparable à des agences comme la CIA. C’est donc à la tête de cet organisme essentiel que Donald Trump a placé Terrance Cole pour remplacer Derek Maltz qui aura fait long feu. Actuellement secrétaire des sécurités publique et intérieure de l’État de Virginie, où il est notamment chargé de superviser l’autorité de contrôle du cannabis (CCA), Cole a travaillé pendant 21 ans au sein de la DEA.
Terrance Cole n’a jamais caché son opposition farouche aux drogues et au cannabis, multipliant les critiques et les phrases lapidaires comme celle qu’il a récemment postée sur le réseau Linkedln avertissant sans ambages les visiteurs de sa page : « Après plus de 30 ans dans les forces de l’ordre, tout le monde connaît ma position sur la marijuana. Il est donc tout à fait inutile de me la demander encore, puisqu’elle n’a pas changé. » Cole n’a de cesse de poster également des liens renvoyant vers des études soulignant systématiquement les dangers du cannabis, qu’il accompagne souvent de commentaires destinés à culpabiliser les consommateurs. Une position radicale qui n’est évidemment pas faite pour rassurer les défenseurs toujours plus nombreux d’une légalisation du cannabis à l’échelle fédérale. Ceci, alors que Trump avait approuvé lors de la campagne électorale la proposition de reclassification de la marijuana du gouvernement Biden, tout comme son ministre de la Santé Robert Kennedy JR.
La nomination de Terrance Cole à la tête de la DEA inquiète les défenseurs de la légalisation fédérale du cannabis.
Même si Terrance Cole n’a pas donné d’avis public sur la reclassification du cannabis, ça n’en est pas moins lui qui devra mettre en œuvre ce processus administratif s’il est adopté par le Sénat, ce qui devrait normalement se produire dans les prochains mois. Son prédécesseur Derek Maltz n’avait pas hésité quant à lui à dénoncer le projet de reclassification entériné par le gouvernement Biden, dénonçant un abus de pouvoir du procureur général qui avait à l’époque signé la proposition de reclassement alors que cette tâche doit normalement échoir au directeur de la DEA. Les deux derniers choix de Trump font suite au désistement de Chad Chronister, shérif du comté floridien de Hillsborough que le nouveau président avait initialement choisi et qui était quant à lui un fervent partisan de la dépénalisation du cannabis. Son bilan en matière de sécurité publique comportait hélas des défaillances qui avaient déplu aux législateurs les plus conservateurs, obligeant Chronister à retirer sa candidature.
Si l’on rajoute à la nomination de Terrance Cole le mutisme de Pam Bondi, future procureure générale de l’État fédéral (pas encore confirmée par le Sénat) qui refuse de se prononcer tant sur la gestion des questions essentielles concernant le cannabis que sur sa reclassification, on peut légitimement s’inquiéter de l’avenir du cannabis récréatif au niveau fédéral sous la présidence de Donald Trump. Reste toutefois le ministre de la Santé Robert Kennedy Jr qui, malgré ses hésitations et ses imprécisions lors de son passage devant la commission sénatoriale a plusieurs fois affirmé qu’il était pour une légalisation de la marijuana à l’échelle fédérale. Le fils du procureur général assassiné en 1968 a également expliqué qu’il souhaitait utiliser une partie des recettes fiscales générées par la vente de cannabis pour financer des programmes de soins destinés à traiter l’addiction à la drogue. La première étape vers le processus de légalisation demeure pour l’instant la reclassification du cannabis au tableau III dont tous les défenseurs de la plante attendent désormais qu’elle soit enfin juridiquement confirmée.