L’efficacité du cannabidiol et plus généralement du cannabis contre la douleur compte parmi les vertus les plus admises ou les moins contestées de la plante. Cette propriété fait d’ailleurs l’objet d’études régulières dont la plupart des conclusions établissent une corrélation entre la prise de chanvre thérapeutique et l’atténuation parfois spectaculaire des douleurs chroniques liées à un certain nombre de pathologies. Une récente étude publiée cette semaine vient une nouvelle fois confirmer ces observations.
Certains effets positifs du cannabis sur la santé semblent désormais faire l’objet d’un consensus médical, même s’il est évidemment toujours audacieux d’évoquer un quelconque consensus en matière de science. Cela en effet pourrait bien ressembler à un oxymore, le doute et la remise en question permanente étant les corollaires naturels de toute discipline scientifique. Mieux vaut donc parler de résultats concordants dans le domaine de la recherche sur les bienfaits du cannabis concernant la douleur chronique. La dernière étude en date sur le sujet nous vient de l’université Drexel sise à Philadelphie, en Pennsylvanie et nous apprend que plus de 80 % des patients ayant consommé du chanvre médical l’ont décrit comme un traitement efficace pour soulager leur douleur. Nous parlons bien évidemment ici des personnes ayant participé à ladite étude, dirigée par le professeur de chirurgie orthopédique à la faculté de médecine de l’université Drexel Ari Greis, également membre du conseil d’administration de la Fondation Rothman consacrée à la recherche sur les opioïdes.
Le compte-rendu de l’étude, publié voilà quelques jours dans la prestigieuse revue Cureus Journal of Medical Science décrit les méthodes de l’enquête menée pendant plus de deux ans, entre octobre 2022 et décembre 2024 auprès de 129 patients détenteurs d’ordonnances prescrivant du cannabis médical, délivrées par différents médecins de Pennsylvanie. Les volontaires ont été suivis par l’équipe scientifique et régulièrement interrogés à l’aide de questionnaires portant sur différents sujets, depuis leurs modes de consommation jusqu’à la description des effets du cannabis sur leur santé physique et mentale. En réponse à la question sur l’amélioration de leurs principaux symptômes grâce au cannabis, 116 personnes sur les 129 ayant participé à l’enquête ont déclaré qu’elles étaient « d’accord » (42,6 %) ou « tout à fait d’accord » (51,1 %). Un seul des volontaires a jugé le cannabis inefficace, le reste d’entre eux, soit sept personnes (5,4 %) préférant rester neutre et ne donner aucun avis positif ou négatif sur cette question.
L’utilisation du cannabis thérapeutique dans la gestion de la douleur chronique pourrait constituer une solution efficace pour pallier le manque de produits pharmaceutiques traditionnels.
Une majorité écrasante néanmoins qui a également décrit des effets positifs plus étendus, comme l’a souligné Mohammad Khal, chercheur à la Fondation Rothman et co-auteur de l’étude : « De nombreux participants ont également noté des améliorations dans les symptômes associés tels que les troubles du sommeil et l’anxiété (…) ce qui laisse envisager que le cannabis puisse offrir une gamme plus large de soulagement que les médicaments contre la douleur conventionnels seuls ». Plus de la moitié des volontaires ont également décrit une amélioration de leur humeur et de leur bien-être quotidien, ce qui paraît assez logique dans le cas d’une diminution de la douleur. Quelques personnes néanmoins ont affirmé a contrario que le cannabis modifiait négativement leur caractère. À propos de leur consommation, les participants à l’étude ont déclaré pour 77,5 % d’entre eux consommer de la marijuana depuis plus de deux ans et le reste du panel (22,5 %) depuis un ou deux ans.
Concernant la fréquence, 27,9 % des personnes prenaient une dose quotidienne de cannabis, 23,2 % en utilisait deux à trois fois par jour. Parmi les 49 % restants, un très petit nombre (3,1 %) n’utilisait du chanvre thérapeutique qu’une seule fois par mois ou moins. Parmi les modes de consommation, le premier d’entre eux était très majoritairement (63,5 %) l’application de produits à base de cannabis directement sur les endroits douloureux, suivi par l’absorption de cachets ou d’huiles, beaucoup de patients utilisant plusieurs méthodes à des moments différents. La plupart des participants (86 %) ont déclaré n’avoir jamais pensé à réduire leur consommation de cannabis et la moitié d’entre eux ont même avoué qu’ils ne connaissaient pas la dose de THC qu’ils utilisaient dans le cadre de leur traitement. Très peu d’effets secondaires mineurs ont été rapportés par les patients, aucun ne décrivant d’effets graves sur leur organisme. Les douleurs concernées par le traitement étaient presque toutes dues à des pathologies osseuses, nerveuses ou musculaires chroniques, incluant l’arthrose, les neuropathies ou la sclérose en plaques. Le professeur Greis a conclu que l’enquête menée par son équipe « soulignait la possibilité que le cannabis serve de solution de remplacement ou de complément plus sûr aux approches standard de gestion de la douleur, ce qui pourrait contribuer à faire face à la crise actuelle des opiacés ».