Alors que la reclassification du cannabis récréatif paraît encore bien hypothétique, malgré le regain d’intérêt manifesté durant l’été par le président Donald Trump, des responsables politiques américains relancent de manière plus frontale le débat sur la légalisation fédérale de la marijuana. Un groupe de représentants démocrates a ainsi lancé une nouvelle proposition de loi en fin de semaine dernière sur ce thème toujours très épineux.
Nous évoquions ici-même le 17 août dernier les mots encourageants du président Donald Trump qui semblait prêt à se pencher enfin sur le cannabis et sa reclassification après plus d’un an de tergiversations, créant à nouveau l’espoir d’une avancée importante vers une future légalisation fédérale. Si aucune date précise n’avait été alors fixée, le locataire de la Maison Blanche avait tout de même évoqué sans prendre beaucoup de risques un « avenir proche », témoignant ainsi une nouvelle fois de la difficulté pour les gouvernements américains de tous bords d’aborder la question de la légalisation du cannabis récréatif. Ceci, même si les derniers sondages sur le sujet donnent une majorité d’Américains assez confortable (60 à 70 %) en faveur d’une décriminalisation de la marijuana, avec même 55 % de républicains y étant plutôt favorables et 87 % chez les démocrates ! Forts de ce quasi plébiscite chez leurs partisans et lassés de constater l’immobilisme des responsables politiques, des représentants démocrates de la Chambre on réintroduit vendredi dernier une proposition de loi en faveur de la légalisation du cannabis récréatif.
Porté par Jerry Nadler, représentant démocrate très actif sur la question du cannabis, ce projet baptisé MORE (ou Loi sur l’opportunité, le réinvestissement et l’exploration de la marijuana) n’est pas tout à fait nouveau, puisqu’il en est à sa quatrième session législative, sans succès à ce jour. Soutenue par des dizaines d’autres représentants démocrates, la loi MORE vise à « retirer le cannabis de la liste des substances réglementées du pays et établir une réglementation commerciale pour le marché de la marijuana ». Pour défendre son projet, Nadler s’est fendu d’une déclaration sans ambiguïté, dénonçant notamment une répression inefficace : « Alors que toujours plus d’États continuent de légaliser la marijuana et que le soutien du public augmente, les lois fédérales doivent rattraper et annuler les politiques qui ont échoué en criminalisant la marijuana. Il est grand temps de dépénaliser la marijuana au niveau fédéral, d’abolir les condamnations qui y sont liées et de faciliter la consommation, tout en réinvestissant dans les communautés les plus touchées par la guerre contre la drogue. »
Présenté pour la quatrième fois successive, le projet de loi démocrate sur la légalisation fédérale du cannabis récréatif aboutira-t-il enfin ?
Dans le détail, le projet des représentants démocrates propose de légaliser le cannabis récréatif au niveau fédéral, en laissant chaque État libre de décider de sa politique en la matière et d’établir sa propre réglementation. Les États auraient également la possibilité de maintenir l’interdiction de la marijuana, sans que le gouvernement fédéral n’ait son mot à dire. Des mesures économiques sont également prévues dans la loi MORE et notamment la mise en place d’une taxe d’accise fixée à 5 % sur tous les produits contenant du cannabis THC, portée à 8 % au bout de cinq ans, ainsi que des recommandations concernant l’emballage et l’étiquetage des produits. La moitié des recettes fiscales liées au commerce de la marijuana et de ses produits dérivés serait utilisée pour « financer un programme communautaire de subventions de réinvestissement, administré par le Ministère de la justice », tandis que 10 % des bénéfices viendraient subventionner des programmes de traitement et de réinsertion des toxicomanes. Le reste des sommes collectées par l’État servirait à « créer et de mettre en œuvre un programme équitable de licence commerciale sur le cannabis », géré par l’Administration des petites entreprises.
Le contenu de la loi MORE soutenue par plus de 30 représentants démocrates a également réjoui le Congressional Cannabis Caucus, un groupe de membres du Congrès favorables au cannabis parmi lesquels Ilhan Omar, l’une des principales responsables, qui a vu là une opportunité de réparer les préjudices subis par les nombreuses victimes du narcotrafic: « La guerre contre la drogue a dévasté les familles et alimenté les disparités raciales en matière d’arrestations et d’incarcérations sans offrir plus de sécurité au peuple américain. La loi MORE dépénalisera la marijuana au niveau fédéral et réinvestira dans les communautés les plus touchées par ces politiques défaillantes », a-t-elle ainsi déclaré, ajoutant qu’il était « largement temps que le gouvernement fédéral mette enfin un terme à l’ère de la criminalisation. » La proposition des représentants de la Chambre a été également été acclamée par de nombreuses associations à but non lucratif, mais aussi plusieurs organisations syndicales ou encore des groupes de défenses des droits civiques qui ont notamment mis en avant le fait que « la criminalisation de la marijuana avait ciblé de manière disproportionnée pendant des décennies les communautés de couleur et les communautés à faible revenu. »













